La NBA vu par Delaney Rudd

Sous le maillot de Utah A l'occasion du 100ème numéros de Basket Hebdo D.Rudd s'exprime sur la NBA. Passé de 89 à 92 par Utah, Delaney Rudd a développé sa passion pour le jeu au contact d'un professeur hors pair, John Stockton.

Si un jeune vient me demander à quoi ressemble la NBA, je lui dirai que c'est le meilleur endroit au monde pour jouer au basket. Tous les soirs, le niveau est le plus élevé au monde. Le style de vie est génial. Les avions privés, les salles géantes tous les soirs. On y passe vraiment du bon temps. Quand tu es en NBA, tu es dans situation où tu as relativement peu stress. Chacun a une tâche à réaliser. Un rôle défini. Si tu perds, tu sais que tu as un match le lendemain. Les matches sont tellement rapprochés qu'il est impossible de se préparer parfaitement pour un match, un adversaire. Parfois, tu n'as me pas le temps de t'entraîner.
Pour réussir comme meneur en NBA, dois être le genre de personne que les autres joueurs acceptent. Tu dois comprendre quelles sont les capacités de chacun. Où aime-t-il recevoir la balle ? Est-ce qu'il préfère une passe avec rebond ou la balle dans les airs ? D'où peut-il shooter ? Lorsque tu es un meneur en NBA, le coach rentre dans ton esprit. Si tu ne peux pas faire sur le terrain ce que veut le coach, tu ne joueras probablement jamais NBA. Si coach Sloan me disait qu'il voulait que ça se passe comme ça, j'avais intérêt à comprendre comment je pouvais faire. Le scoring n'est pas si important que cela pour Jerry Sloan. Il s'agit d'abord de faire jouer les autres. Cela dépend beaucoup du coach. Jerry Sloan ne va pas me dire de ne pas marquer mais il dit toujours que le point-guard n'est pas la première option. Lorsqu'on joue dans la même équipe que Karl Malone, on sait que la première option, c'est lui. Après ça, si tu marques 20 points, c'est parfait.
Mais un Iverson ou un Marbury ne sont peut-être pas le genre de joueurs qui pourraient jouer à Utah. Ce sont de super joueurs, mais ils n'ont pas vraiment le profil pour jouer à Utah, ou même à Chicago.
John Stockton est un joueur formidable dans tous les secteurs du jeu. Il défend, il passe, il shoote. Mais sa plus grande force, c'est la manière qu'il a de réfléchir au jeu. Il voit des choses qui vous laissent sans voix. Vous vous dites: Oh! Comment a-t-il pu voir ça ! Il passe la balle à des joueurs que personne ne regarde et boom! C'est le lay-up. Pour moi, c'était vraiment extraordinaire parce que j'ai eu la chance de pouvoir apprendre de celui qui, pour moi, est le meilleur meneur en NBA. Je lui posais sans cesse des milliers de questions. Comment tu réussis à voir ça ? Pourquoi tu as fait ça ? Et il me répondait toujours. Il me disait tout le temps : Voilà ce que tu dois faire. Parfois, en match, je le refaisais. Alors, je m'approchais du banc et on se tapait dans les mains. Il me disait : te l'avais dit, je te l'avais dit. C'était fabuleux pour moi. Parfois, il n'arrivait pas à expliquer ses trucs. Il disait simplement: Oh! Je ne sais pas. Je lai fait, c'est tout. Mais si c'était un point particulier sur lequel il pouvait m'aider, il le faisait tojours. Aux entraînements il me disait : Tu sais, hier, tu as fait une mauvaise passe et si tu avais fait ça, cela aurait été mieux pour toi. Nous étions amis. Quand j'ai quitté Utah, il était triste. Il m'a dit : Bonne chance, je suis vraiment désolé, mais c'est le business.
Mais attention, cela ne veut pas dire qu'à l'entraînement, il n'était pas à 100%. Il te donnait des coups de coude. C'est son style. Tu sais ce qui va se passer. Tu sais que tu ne peux pas tricher à l'entraînement, parce qu'avec John, tu vas te faire détruire. Par rapport aux autres meneurs que je rencontrais, la différence c'est qu'il fallait que je défende sur lui pendant tout l'entraînement. John me préparait à faire la guerre. Toutes les petites astuces, les écrans, c'était pareil à l'entraînement. Ça, c'est John. Ce que tu vois pendant un match, c'est John, parce que c'est ce qu'il répète tous les jours à l'entraînement. Quand j'ai vu John pendant les Finals, je n'ai pas trouvé qu'il avait réellement changé. Ce sont plutôt les autres joueurs qui ont changé. Tous les joueurs du banc sont des vétérans. Aujourd'hui, les Jazz ont des joueurs s n'ont as eur de mettre sur le terrain. Ils ont confiance en ces joueurs. Pour moi, la différence est là. Howard Eisley est le joueur typique d'Utah. C'est le genre de joueur dont personne ne pensait qu'il était capable de jouer à ce niveau. Pour moi, c'est la même chose. Les autres équipes pensaient peut-être que je n'étais pas capable de jouer. jerry Sloan nous a donné la chance de jouer quelques minutes, de faire un boulot précis et de revenir sur le banc. De là à dire qu'Howard Eisley va prendre la relève de John Stockton, wwoooff ! Ce n'est pas chose facile. Une fois John parti, les gens vont s'attendre à ce que son successeur fasse les mêmes choses que lui.
A part John Stockton, le meneur qui m'a posé le plus de problèmes en défense, c'est Kevin Johnson. Je n'ai jamais réussi à trouver la solution. En attaque, c'est Derek Harper qui défendait le mieux sur moi. Il arrivait toujours à faire siffler les arbitres contre moi. Ça m'énervait. Mon meilleur match, c'était contre New Jersey. John Stockton était blessé. J'étais starter. J'ai marqué 19 points, fait 9 passes et on a gagné le match. Le en emain, on jouait à Charlotte. Toute ma famille était là, car je suis originaire de Caroline du nord. J'ai de nouveau démarré le match. J'ai mis 17 points et fait 8 passes. On a encore gagné. Là, j'étais au sommet. J'étais chez moi à Utah. Salt Lake City était un endroit parfait pour élever mes enfants. Je m'étais fait à l'idée d'habiter à Utah. Le jour où il a fallu partir, j'ai eu du mal. J'avais beaucoup d'amis là-bas qui ne jouaient pas au basket. Et puis, le Jazz, c'est comme une famille. C'est ça que je respecte à Utah. Si un joueur ou quelqu'un du staff faisait un dîner chez lui, il nous invitait toujours. Chaque fois que j'ai été coupé en NBA, qu'il a fallu que je parte, j'ai pleuré. Je suppose que je suis quelqu'un de sensible.
Voilà, c'est pour cela que je voudrais qu'Alain Digbeu joue en NBA. Il a une véritable adoration pour la NBA. Quand je l'ai rencontré, il me demandait toujours : Jouer contre Jordan, c'est comment ? Jouer contre Malone, c'est comment ? Il me suffisait de voir son visage pour me rendre compte qu'il était tout excité lorsqu'il entendait des histoires de NBA. A cause de cela, pour moi, pour lui, pour tout le monde, ce serait formidable qu'il joue en NBA. Parce qu'il a un amour du jeu comme l'ont les Américains. Nous grandissons en ne pensant qu'à la NBA. C'est son rêve. Aujourd'hui, rien n'a changé. Lorsque vous racontez une histoire de NBA, il est toujours le premier à vouloir l'entendre.


Paru dans Basket Hebdo n°100